Grèce : découvrir Athènes, étourdissant berceau de l’Europe

par Pierre
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Dans le quartier de Pláka à Athènes.

Athènes est une métropole assez difficile à décrire. Indissociable de son Acropole et de la splendeur de la Grèce antique (qu’elle a fini par incarner à elle seule !), elle se révèle aussi anarchique et parfois quelconque. C’est peut-être cela, au fond, qui me plaît tant dans la capitale grecque : ce patchwork de beauté absolue et de médiocrité, cette quête contradictoire d’harmonie divine et d’anarchie, ce côtoiement de vieille gloire et de vie quotidienne indifférente au tourisme. Quelque chose se passe ici c’est certain… Voici mon petit guide pour découvrir cette ville fascinante.

 

 
 

Athènes se présente (et ce n’est pas un long fleuve tranquille)


Quand on veut parler d’Athènes, quelque chose saute immédiatement aux yeux : cette vision iconique de l’Acropole est bien trompeuse. Il n’y a aucun juste milieu à Athènes : son histoire ressemble à des montagnes russes.
 

Au commencement fut un olivier…

Statue d'Athéna.

Athéna.

Ce qui caractérisa l’Athènes antique, ce fut sans aucun doute la démocratie. La légende même de la fondation de la cité s’y réfère : Athéna, déesse de la sagesse, et Poséidon, dieu des mers, se disputèrent l’honneur d’être la divinité principale de la ville. Athéna se proposa d’offrir les grâces d’un olivier, tandis que Poséidon sortit de sa besace une source… d’eau salée.

Les citoyens furent appelés à voter. Les femmes plébiscitèrent Athéna ; les hommes Poséidon. Et à cette époque, les femmes étaient plus nombreuses à Athènes…
 

L’Athènes antique : le siècle d’or de Périclès

Statue de Périclès.

Périclès.

Le siècle d’or d’Athènes est le Ve siècle avant Jésus-Christ : c’est le “siècle de Périclès”, du nom de l’homme d’État qui porta la cité grecque au faîte du monde antique – et dont les répercussions sur notre vie actuelle sont incalculables.

En quelques dizaines d’années à peine, Athènes devint la patrie de philosophes, d’artistes, de scientifiques dont les noms n’en finissent pas résonner : Platon, Socrate, Sophocle, Thucydide, Phidias… C’est à Périclès que l’on doit l’édification de l’Acropole par exemple.
 

Athènes, ou la Belle au bois dormant

La place Monastiraki à Athènes.

Mosquée et Acropole.

Si la renommée intellectuelle d’Athènes ne faiblit pas, sa puissance politique déclina ensuite rapidement. Conquise par les Romains, qui l’admiraient sans doute plus que les Athéniens d’alors, elle fut une des plaques tournantes du christianisme naissant (saint Paul y prêcha beaucoup) puis, chose incroyable… s’ensuivirent quasiment 1500 ans d’oubli et d’obscurité. Que ce soit dans le giron de l’empire byzantin, des croisés, de l’empire ottoman, rien ou presque ne se passa à Athènes.

C’est la guerre d’indépendance grecque (commencée en 1821) qui réveilla Athènes. Et encore, pas tout de suite : c’est Nauplie, jolie ville du Péloponnèse, qui fut choisie comme première capitale du nouvel État. Capitale qui fut déplacée à Athènes en 1834 ; c’était alors une bourgade d’à peine quelques centaines d’habitants ! Elle en compte aujourd’hui 3 millions…
 

Le XXIe siècle : prince ou crapaud ?

Course aux jeux olympiques d'Athènes.

Les J.O. de 2004.

Le moins qu’on puisse dire, c’est que le destin d’Athènes est très bousculé depuis le début des années 2000. Tout d’abord par les Jeux olympiques de 2004 qui, au prix d’incroyables efforts financiers, ont permis de moderniser Athènes à vitesse grand V. Revers de la médaille : le coût d’un tel événement, disproportionné par rapport aux moyens d’un pays comme la Grèce, a été un des déclencheurs majeurs de la crise économique grecque.

C’est une dimension qui fait mal au cœur et qu’il faut prendre en compte lorsqu’on se rend à Athènes. Tous les Grecs qui vous croiserez souffrent ou auront souffert d’une manière ou d’une autre, et souvent bien plus qu’ils le laissent supposer. J’espère pouvoir mettre cet article à jour et effacer cette référence le plus rapidement possible.
 
 

L’Acropole et l’Athènes antique


C’est évidemment le phare, l’incontournable d’Athènes. L’Acropole (littéralement “la ville haute”), est un sanctuaire fortifié occupant un vaste plateau de quelque 400 mètres de long sur moins de 100 de large. Entièrement réaménagé au Ve siècle avant Jésus-Christ sous l’égide de Périclès notamment, l’Acropole offre un somptueux condensé de l’âge d’or de la Grèce antique.

Vue de l'Acropole d'Athènes.

Peu importe le côté duquel on l’aborde… La masse de l’Acropole est toujours spectaculaire. Ici : l’entrée principale de la colline sacrée.


On y accède par une colonnade monumentale, les Propylées, accompagnée par le superbe petit temple d’Athéna Nikè : celui-ci apparaît telle une figure de proue, avec la mer en toile de fond.

Le cœur de l’Acropole est bien entendu le Parthénon : c’était le temple d’Athéna, protectrice de la cité. Il est dû à Phidias, le plus célèbre des architectes grecs. Il fut fortement endommagé en 1687 quand, transformé en magasin à poudre, il fut touché par un boulet de canon vénitien. Si on peut admirer inlassablement sur place l’harmonie de ses proportions, il faudra aller au British Museum de Londres pour ses sculptures… et c’est un sujet de polémique insoluble entre la Grèce et le Royaume-Uni depuis deux siècles !

À côté du Parthénon, vous ne pourrez pas manquer l’Érechthéion, un autre temple qui renfermait notamment le souvenir de la lutte initiale d’Athéna et de Poséidon pour la protection de la ville : un olivier et un puits d’eau salé. Mais c’est surtout les Caryatides, ces statues de femmes ciselées avec raffinement, qui fascinent depuis des millénaires.

La visite de la ville antique d’Athènes peut se poursuivre au pied de l’Acropole, avec du côté sud les superbes sites de spectacle que sont le théâtre de Dionysos et surtout l’Odéon d’Hérode Atticus, mieux conservé et installé dans un cadre somptueux. Un chouia plus loin, dans la ville, vous pourrez visiter le musée de l’Acropole. Au nord de la colline sacrée se trouvent les reste de l’Agora, soit l’ancienne place centrale de l’Athènes d’alors, mais les ruines sont plus abstraites.

Quand visiter l’Acropole ?
Dans tous les cas, vous ne serez jamais seul sur l’Acropole. Comme toujours dans ces cas-là, je vous conseille de visiter le site très tôt le matin, ou bien dans la dernière heure d’ouverture du site, quand les groupes mais aussi la lumière crue du milieu de journée sont laissent les ruines en paix.

 
 

Pláka et Monastiráki, ou le vieil Athènes


En soi la “vieille ville” d’Athènes, tel que nous l’entendons, se réduit à peu de choses en terme de surfaces : ce sont les deux petits quartiers de Pláka et Monastiráki, soit quelques rues lovées sur le flanc nord de l’Acropole. S’ils sont très fréquentés par les touristes et les chats (et là encore, tout dépend de l’heure et de la saison à laquelle vous y flânerez), ils n’en possèdent pas moins un certain charme.

Dans le quartier de Pláka à Athènes.

À gauche : Anafiótika et ses maisons cycladiques. À droite : la tour des Vents et sa zone archéologique. Deux visions du célèbre quartier de Pláka.


Cela est dû au cadre, bien sûr, avec l’Acropole qui veille quelques dizaines de mètres au-dessus des têtes. Ajoutez à cela ces monuments de diverses époques et cultures qui donnent à Pláka un air d’un joli fourre-tout : la Tour des Vents d’époque romaine, la vieille église byzantine de Saint-Nicolas-Rangavas ; les anciennes mosquées ottomanes Tzistarakis et Fétichié ; le micro-quartier d’Anafiótika, avec ses petites maisons cubiques blanches rappellent les îles des Cyclades : c’est en effet là qu’habitaient les émigrés de l’île d’Anafi, qui vinrent participer comme ouvriers à l’agrandissement de la capitale de la Grèce au XIXe siècle.

Au-delà de la place Monastiráki (où se tient un marché aux puces tous les jours et surtout le dimanche), le quartier de Psyrí est un peu le prolongement du vieil Athènes : mais ici, le méli mélo des siècles s’efface pour laisser place à la vie quotidienne des Athéniens. Athinas est un peu la rue-bazar d’Athènes. Elle conduit jusqu’aux Halles municipales (Κεντρική Δημοτική Αγορά Αθήνας, un bon plan pour les ventres creux) et au-delà à la place Omónia, un des centres de gravité de la capitale grecque.
 
 

La place Syntagma, Kolonaki, Exárcheia : le choc des contraires


L’autre place importante d’Athènes, et de loin la plus emblématique, est la place Sytagma (Πλατεία Συντάγματος, soit “Place de la Constitution”). Elle est dominée par la grande façade de l’ancien palais des rois de Grèce, qui abrite aujourd’hui le parlement. Au pied de l’escalier monumental se trouve la tombe du soldat inconnu, devant laquelle se déroule chaque heure la relève de la garde des Evzones. Ces soldats de la garde présidentielle se distinguent par leur uniforme atypique, directement inspiré par le costume traditionnel grec.

Vues de la vieille ville d'Athènes.

L’ordre et le désordre qui se côtoient… À gauche : la relève des Evzones sur la place Syntagma. À droite : le dédale du quartier alternatif d’Exárcheia.


Derrière le parlement, le Jardin national d’Athènes est aujourd’hui un jardin botanique ouvert au public ; c’était jadis les jardins du palais royal. Si vous poussez un tout petit peu la promenade, vous tomberez immédiatement sur la célèbre et imposante enceinte du Stade panathénaïque (Παναθηναϊκό Στάδιο). Ce stade antique fut entièrement reconstruit dans son style originel en 1896 pour les premiers jeux olympiques de l’ère moderne, mais aussi pour l’arrivée mythique du marathon, dernière épreuve des J.O. de 2004.

Une déambulation au nord de la place Syntagma, en direction de la colline du Lycabette, nous conduit dans un étrange choc entre deux mondes étanches. On traverse d’abord le quartier chic et huppé de Kolonáki. Si l’aisance est palpable, architecturalement c’est plutôt un étrange côtoiement d’élégance et de laideur.

Puis, une fois passée la ligne des rues Amerikís et Likavittoú, le contraste est immédiat : on plonge pour ainsi dire dans le quartier populaire d’Exárcheia, où fleurissent les affiches revendicatrices et les boutiques indépendantes. C’est le fief des mouvements anarchistes et alternatifs athéniens. Quartier à fleur de peau, parfois éruptif, il ne parvient toutefois pas à échapper à la gentrification. Il abrite le fabuleux Musée archéologique d’Athènes. Pour un peu de verdure, il y a aussi le grand parc du Champ-de-Mars.
 
 

Les collines et panoramas sur Athènes


Vous allez vite le constater : Athènes n’est pas forcément une ville plate. Comme à Rome ou à Lisbonne, on raconte que sept collines composent son centre-ville. Je pense sincèrement que pour aimer Athènes, il ne faut pas hésiter à grimper. Quitte à la maudire… C’est le seul moyen de s’imprégner de son mélange de verdure et d’aridité, d’adoucir son expérience urbaine avec l’élément vital qu’on oublie tellement dans ses rues : la mer, éternelle, bleue, si proche. Voici quelques-unes de mes ascensions préférées :

*️⃣ À proximité immédiate de l’Acropole, il y a une série de trois “sommets” : la colline de la Pnyx, celle de l’Aréopage et celle de Filopappos – ou des Muses. Elles permettent d’avoir trois points du vue magiques, ni trop près ni trop loin, de la colline sacrée d’Athènes. À admirer surtout au petit matin ou en soirée, quand la lumière se tamise, s’adoucir : l’Acropole semble alors se mettre au diapason des belles soirées grecques.

*️⃣ Impossible de rater le mont Lycabette (Λυκαβηττός): ce piton abrupt, à la forme conique presque parfaite, est le plus haut sommet d’Athènes avec ses 277 mètres de hauteur. Alors forcément le panorama prend là-haut une autre dimension. Ça grimpe sec à pied mais rassurez-vous : il y a aussi un funiculaire. Du sommet, la mer blanche des immeubles qui glisse vers la Méditerranée semble gigantesque, ponctuée par les taches vertes des collines et des parcs. Le Lycabette est certes une attraction touristique mais un comme la colline est un peu à l’écart du centre-ville, on y respire encore, dans tous les sens du terme.

Vue du mont Lycabette à Athènes.

Le mont Lycabette est le belvédère le plus important d’Athènes.


*️⃣ Au cours de votre balade dans Exárcheia, ne manquez pas le petit parc Stréfi avec sa petite colline d’où on jouit d’un panorama insoupçonné sur Athènes.

*️⃣ À quelques 5 kilomètres au sud-ouest de la vieille ville, dans le quartier de Kallithéa (Καλλιθέα) l’architecte italien Renzo Piano a transformé en 2016 ce qui était autrefois un parking pour les jeux olympiques en le Centre culturel Stavros Niarchos (la fondation de l’armateur a réglé l’ensemble de l’ardoise de 550 millions d’euros), qui regroupe la Bibliothèque nationale de Grèce, l’Opéra national, ainsi qu’un parc de 17 hectares. Occupant un site légèrement surélevé, le centre culturel est un somptueux belvédère sur Athènes et la mer, et il a été adopté d’emblée à la fois par les Athéniens et les visiteurs (chose assez rare pour être soulignée).
Un centre culturel contemporain à Athènes.

Au sud de la ville, au bord de la mer, la fondation Niarchos est le symbole du renouveau d’Athènes.


 
 

Sortir d’Athènes : direction la mer


Athènes est parfois – et rapidement – étourdissante. C’est pourquoi, si vous le pouvez, je vous conseillerais sans hésiter de compléter votre séjour par une journée d’excursion. Je pense pour cela à deux options.

1️⃣ La première est de louer une voiture à Athènes pour une journée et de partir vers le cap Sounion (Aκρωτήριο Σούνιο). La pointe la plus méridionale de l’Attique est occupée par un superbe sanctuaire dédié à Poséidon. La vision des colonnes du temple dominant la mer de plus de 50 mètres d’à-pic, battues par le vent iodé et faisant face aux premières îles des Cyclades est extrêmement romantique. Les couchers de soleils y sont particulièrement magiques.

Deux sites à voir autour d'Athènes.

Un peu d’air frais tout proche de la grouillante Athènes ? C’est possible ! Au-dessus : le temple du cap Sounion. En-dessous : le port d’Égine, capitale de l’île éponyme.


2️⃣ Aller sur une île. Plutôt que d’aller à Salamine (la plus proche d’Athènes, mais pas franchement terrible), mon cœur penche pour Égine. Depuis le Pirée, il faut compter une grosse heure de traversée (partez donc tôt pour profiter de la journée). L’île est considérée comme la capitale de la pistache.

À voir à Égine : Hora, sa petite capitale animée ; le sanctuaire de Saint-Nectaire (rien à voir avec le fromage français) et les 35 églises de Paléohora, l’ancienne capitale disparue ; le temple d’Aphaia ; pour se baigner : les plages de Marathona et Aghia Marina, ou l’îlot de Moni Eginas face au village de Perdika.
 
Et si vous avez plus de temps, Athènes est le point de départ idéal pour un circuit de 10 jours dans le Péloponnèse.
 

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