ATTENTION : FESTIVAL PAÏEN UNDERGROUND

par Chris
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Vue d'une foule de personnes tirant des feux d'artifice lors d'un festival du feu.

À Cervera, chaque été, les habitants de la ville se réunissent au coucher du soleil pour nourrir leurs sombres desseins. Pour vous joindre à eux, suivez le rythme endiablé des tambours et engouffrez-vous dans les ruelles de la ville qui vous mèneront à la fête païenne la plus démente que vous n’ayez jamais vue. Au programme de ce festival atypique, marchés d’objet occultes, correfocs, spectacles, concerts et pluie de semence divine.

Amuse-bouche historique – Origine de l’Aquelarre

Les ruelles de Cervera abritaient jadis des sorcières, largement persécutées au Moyen-âge. La légende raconte qu’elles se réunissaient dans une venelle de la ville, el carreró de les bruixes (la ruelle des sorcières) à chaque pleine lune pour s’adonner à leurs rites maléfiques. C’est d’ailleurs de là que vient le mot Aquelarre, qui signifie le champ du bouc. Les sorcières se réunissaient dans une prairie ou dans un champ afin de s’adonner à leurs rituels et incantations. Elles imploraient el mascle cabró, « le bouc », pour que celui-ci leur confère des pouvoirs magiques en échange de leur âme.

Petit à petit, certaines images ont commencé à s’ancrer dans l’imaginaire collectif. On croyait les sorcières des femmes laides et pustuleuses. On leur attribuait des verrues, que l’on disait être des mamelons qui servaient à allaiter des êtres maléfiques. Ou alors, au contraire, c’était les femmes attirantes, sexy, et envoûtantes qu’on taxait d’ensorceleuses. Celles qui avaient une emprise sur les hommes. Celles qui prenaient soin d’elles, jolies, toutes en seins et toutes en cuisses. Cultivées, insoumises, téméraires. En définitive, des femmes jugées dangereuses.

C’est aussi pourquoi pendant des siècles, elles ont été couvertes d’infamies. Elles ont été mises à la géhenne, répudiées, brûlées vives sur ordre de l’Église et sous les vivats des foules. La sorcière, finalement, c’est le symbole d’une oppression millénaire infligée aux femmes, mais aussi celui de l’Aquelarre. Cette fête païenne, qui nait de traditions profondément ancrées dans la culture catalane, revendique désormais l’émancipation des femmes d’une société considérée trop patriarcale.

Le bouc de Mendès, symbole de fertilité, de luxure et origine du culte du phallus

C’est la star de la soirée et celui que tout le monde attend : le bouc. Représentation du malin, il est connu sous de nombreux noms selon les cultures et les traditions. On le nomme Pan dans la mythologie grecque, Aker dans la mythologie basque ou encore Satanas chez les chrétiens.

Le bouc en pleine action lors de l’Aquelarre de Cervera, Lérida (Photographe : © Marc Castellà)

Ici, à Cervera, on l’appelle le mascle cabró. Il fait son apparition vers minuit et mène la danse. Ce qui est sûr, c’est qu’il est très excité d’être là… Et pour cause : il est accompagné d’une parade de monstres, de bêtes de la forêt et de châteaux magiques, enfiévrés par la musique chamanique aux tambours.

Vous êtes arrivés jusqu’ici, alors maintenant il faut danser ! Laissez-vous aller sur le rythme endiablé des percussions…. Les douze coups de minuit ont sonné, allez, c’est le moment. Le mascle cabró est prêt, il va se lâcher ! Laissez-vous donc recouvrir de sa divine semence. Ne soyez pas timides : celle-ci vous octroiera des pouvoirs magiques qui vous permettrons de récupérer un amour perdu, d’étancher votre soif d’argent ou encore de faire correspondre un amour non réciproque. Enfin, c’est ce qu’on raconte.

Correfocs

Les plus intrépides d’entre vous mourront d’envie de participer aux correfocs, « les feux qui cours ». Emblème incontestable des fêtes de la région, ils vous plongeront dans les cultures catalanes et roussillonnaises.

Photo d’un correfoc lors de l’Aquelarre de Cervera(Photographe : © Marc Castellà)

Les habitants de la ville revêtissent l’apparence de diables et empoignent leurs fourches sur lesquelles des feux d’artifices sont embrochés. Leurs mèches se mettent à feuler alors qu’elles sont chatouillées par les flammes des flambeaux qui courent de mains en mains. Le spectacle commence. Les fourches se mettent alors à crier et cracher et les diables se déchaînent. Des essaims d’étincelles fendent l’air épais de l’été en bourdonnant. Les tambours cognent comme des cœurs prêts à exploser.

Photo d’un correfoc lors de l’Aquelarre de Cervera (Photographe : © Marc Castellà)

C’est le moment ! Prenez part au sabbat en entrant dans la danse. Mais attention, pour votre baptême du feu, soyez préparés. Portez du jean ou autre tissu ignifuge et n’oubliez surtout pas de vous procurer l’un des sombreros distribués par la ville si vous ne voulez pas de nouvelle coupe de cheveux.

Séance d’occultisme et marché d’objets occultes

Spéctacle pendant l’Aquelarre de Cervera. (Photographe : © Marc Castellà)

Envie de savoir ce que l’avenir vous réserve ? Pendant ce festival, sorcières et médiums seront à votre disposition pour répondre à toutes vos questions. Lecture des lignes de la main, pendule, tarot et autre arts occultes vous permettront de faire l’expérience d’une séance paranormale. Ce marché regorge aussi de grigris en tout genre pour vos séances de spiritisme, pour pratiquer des rituels vaudou ou encore, pour que vous que vous puissiez vous débarrasser du mauvais œil une bonne fois pour toute.

L’Aquelarret, l’Aquelarre des enfants

En plus, si vous venez en famille, la mairie de Cervera a pensé à tout. De nombreuses activités sont disponibles pour les enfants afin qu’ils puissent s’amuser, se dépenser et même s’épuiser, et que vous ayez ainsi l’occasion de profiter de la soirée entre adultes. Les activités sont variées : mini-correfocs, parades en échasses, ateliers maquillage, musique de rue, bains de mousse et enfin, spectacles de « grosses têtes ». Mais ne vous en faites surtout pas, ces grosse-têtes-là sont beaucoup plus sympas que Laurent Ruquier. « Els caps grossos », comme on les appelle ici, sont des personnages gigantesques en papier mâché qui traversent les rues en crachant sur les gens. Autant dire que vos enfants s’amuseront comme des petits diables !


L’Aquelarret, la version de l’Aquelarre pour les enfants (Photographe : © Marc Castellà)

Cervera, terre de sorcellerie et d’énergies mystiques

Enfin, quelques mots sur Cervera. Il s’agit d’une petite ville d’à peu près 10 000 habitants qui se situe dans la province de Lérida (Lleida en catalan). C’est aussi la capitale de la comarque la Segarra.

La nuit, vous noterez sûrement l’ambiance spécial de la ville. N’hésitez pas à laisser votre sixième sens vous guider à travers les venelles de la ville et découvrir ce magnifique village médiéval. Il y a franchement pas mal de choses à voir : les murailles de cette ville forteresse, l’ancienne université de Cervera, qui fut longtemps la seule université en fonctionnement en Catalogne, ainsi que de nombreux belvédères qui vous offriront des vues imprenables sur la Segarra.

Photo de Cervera, Lérida (#306898178 | Auteur : © Ioanna_alexa – stock.adobe.com

En bref, si vous prévoyez d’être en Catalogne cet été, l’Aquelarre est l’évènement à ne pas manquer

Je dois vous avouer que quand j’y suis allé pour la première fois, je ne m’attendais pas à ce que ce soit si fou. On parle quand même ici d’un village d’à peine dix mille habitants dans l’une des provinces les plus rurales de la région et d’une fête païenne plutôt underground. Mais que nenni ! C’est frais, original, super bien monté et il y a une ambiance de folie. La musique est variée et les spectacles vous plongent dans un univers étrange et fantastique. Et tout ça, ça se passe à seulement une heure de Barcelone en voiture. Alors n’hésitez pas !

Dates : Dernier weekend d’août
Plus d’infos : https://www.aquelarre.cat/

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